Covid-19 : la menace de trop pour les enfants réfugiés

fille réfugiée avec un masque à cause du Covid-19

Au Bangladesh, en Grèce ou au Liban, les familles réfugiées vivaient déjà dans un environnement très précaire. Logées dans des tentes ou des abris de fortune, elles subissent de plein fouet les conséquences destructrices de la pandémie de Covid-19. Sur le terrain, nos équipes agissent en urgence et avec créativité pour diminuer les risques de contagion et répondre aux besoins croissants des enfants et de leurs parents. 

Une clôture encercle le camp de réfugiés de Koutsohero en Grèce. Derrière, les containers blancs qui servent d’abri aux familles s’étendent à perte de vue. Depuis mars, le camp n’échappe pas au cataclysme mondial provoqué par la pandémie de coronavirus. Si ses conséquences ont mis à genoux les systèmes de santé et l’économie des pays les plus riches, elles sont dévastatrices sur les populations qui vivent dans des conditions déjà précaires, notamment les réfugiés. 

«La situation actuelle a créé un traumatisme supplémentaire pour les familles qui s’ajoute à leur parcours de vie déjà très difficile», explique Jezerca Tigani, cheffe de la délégation de Terre des hommes en Grèce. «Les gens vivent dans des camps surpeuplés. Le manque de place empêche le respect des distances sociales. Les cuisines et les sanitaires sont partagés et le matériel de protection limité.» Les services de base dans la plupart des camps en Grèce sont réduits au minimum voire complètement à l’arrêt. 

L’incertitude ambiante et les nouvelles contraintes rendent la situation particulièrement angoissante pour les enfants. «Les familles se retrouvent à six ou sept dans un container de 12 mètres carrés qui leur sert d’abri, sans occupation. Les enfants montrent des signes de colère, d’agressivité. Nous les voyons pleurer plus souvent», précise Jezerca. Le constat est similaire dans les camps dans lesquels nous travaillons au Liban ou encore au Bangladesh. 

Informer et prévenir 

Une partie de notre réponse d’urgence consiste à diffuser des messages de prévention dans les camps de réfugiés. Pour beaucoup, nous sommes devenus l’une des seules sources d’informations fiables et régulières. Sazed Ansari, coordinateur national en protection de l’enfance à Teknaf au Bangladesh, rapporte : «Nous sensibilisons les parents et les enfants à l’importance des mesures sanitaires et d’hygiène, et leur montrons comment se laver les mains de manière efficace».

Petite fille et petits garçons se lavant les mains à cause du covid
Petite fille et petits garçons se lavant les mains à cause du covid

Dans les camps de réfugiés au Bangladesh, nous sensibilisons les enfants à l'importance de lavage des mains.

Les difficultés économiques s’aggravent 

«Beaucoup de parents ne peuvent plus travailler, ce qui laisse les familles sans revenu pour subvenir à leurs besoins de base», ajoute Sazed. Les parents n’ont parfois pas d’autre choix que d’envoyer leurs enfants travailler. 

L’inquiétude et le stress des parents se répercutent aussi sur les membres de la famille. Maysaa Shami, spécialiste en santé mentale des enfants au Liban, précise : «Certains parents se sentent coupables de ne plus avoir de revenu. Ils sont frustrés, inquiets, et cela augmente le risque de violence physique ou psychologique envers les enfants». 

Dans ce contexte de crise sanitaire mondiale, notre priorité est de continuer à soutenir les enfants tout en respectant les mesures barrières. Un défi que nous surmontons grâce à la créativité et à l’engagement de notre personnel sur le terrain. 

Surmonter ses angoisses 

Les séances de soutien psychologique se font désormais à distance. Au Liban par exemple, nous travaillons avec des enfants réfugiés syriens et palestiniens qui vivent dans des camps. «Au lieu de nous rendre chez eux, nous communiquons par téléphone ou par appel vidéo», explique Maysaa Shami. «Ils se posent beaucoup de questions : Que se passe-t-il ? Est-ce normal que je me sente mal ? Nous les aidons à comprendre la situation ainsi que leurs réactions»

Anas*, jeune réfugié syrien de 14 ans, participe à ces séances. «J’ai quelqu’un à qui parler et à qui je peux dire ce que je ressens et ce qui se passe dans ma tête. Ces sessions nous donnent l’énergie positive nécessaire pour surmonter nos préoccupations.»

Père et fils libanais dans la rue lors du covid
Saïd et son fils Anas
réfugiés syriens qui vivent dans un camp au Liban.

«Nos vies ont été chamboulées»

Les effets bénéfiques se constatent rapidement. «On remarque un changement dans leur comportement, leur joie de vivre revient peu à peu. Ils prennent eux-mêmes des initiatives et commencent à dessiner, écrire de la poésie, rédiger des petits articles, bricoler ou cuisiner», poursuit Maysaa Shami. 

Les parents sont également inclus dans ce processus, une étape essentielle. «Nous les rassurons et les aidons à s’ajuster à cette nouvelle vie. Ainsi, ils se sentent mieux, ce qui leur permet d’améliorer leur relation avec leurs enfants.» 

Bien qu’indispensable, le soutien psychologique à distance compte aussi ses défis. La confiance entre l’enfant et le travailleur social est plus difficile à construire. «Par téléphone ou en vidéo, nous ne parvenons pas à saisir toutes les expressions faciales, le langage corporel. Cela prend plus de temps», ajoute Maysaa.

Femme distrayant des enfants réfugiés par appel vidéo a cause du covide
Femme distrayant des enfants réfugiés par appel vidéo a cause du covide

Maysaa Shami anime une session de soutien psychologique à distance.

L’engagement des équipes sur le terrain 

En première ligne, les équipes elles-mêmes subissent un niveau de stress élevé. En Grèce, Jezerca Tigani souligne l’implication du personnel sur le terrain. «Je suis impressionnée par leur engagement pendant cette période difficile. Le staff avait le choix de continuer à travailler dans les camps ou de le faire à distance. La plupart n'ont pas hésité et ont continué à se rendre sur place.» 

Retrouvez le reportage complet ici.

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